C’est une histoire connue de tou.tes, racontée au coin du feu ou partagée sur les réseaux sociaux : nous avalerions en moyenne huit araignées par an durant notre sommeil. Cette affirmation précise, un peu dégoûtante, est juste assez crédible pour s’ancrer au sein de l’imaginaire collectif. Elle a probablement causé plus de grimaces et de nuits agitées que n’importe quelle autre légende urbaine.
Mais cette affirmation terrifiante est-elle basée sur une once de vérité ? Est-il possible qu’en toute innocence, nous servions de « snack » nocturne à ces créatures à huit pattes ?
Il est temps de démêler le vrai du faux et de mettre fin à cette angoisse. Nous allons mener l’enquête et découvrir pourquoi vous pouvez, dès ce soir, dormir sur vos deux oreilles.
Non, vous n’avalez pas d’araignées la nuit : une réponse définitive
Allons droit au but pour rassurer les plus anxieux : cette histoire est un mythe complet. Il n’existe aucune étude scientifique, aucun rapport d’entomologiste, ni aucune donnée crédible qui soutienne cette affirmation. C’est une construction de toutes pièces qui a su exploiter une peur commune pour se propager.
En réalité, la probabilité que vous avaliez une seule araignée durant votre sommeil au cours de votre vie est proche de zéro. Ce n’est pas une opinion, mais une conclusion basée sur la logique, la biologie et le comportement, autant celui des araignées que le nôtre.
Pourquoi ce mythe est biologiquement improbable
Pour qu’un tel événement se produise, il faudrait un alignement de circonstances si extraordinaire qu’il en devient absurde. Analysons la situation avec un peu de bon sens.
1. Le point de vue de l’araignée : un danger, pas une cible
Mettons-nous un instant à la place de l’araignée. Pour elle, un être humain endormi n’est pas un refuge accueillant, mais un prédateur géant et imprévisible.
Votre lit est une zone de danger, vibrant au rythme de votre respiration et de vos mouvements. Votre bouche, quant à elle, est encore pire : c’est une caverne chaude et humide d’où s’échappe un souffle puissant et constant de dioxyde de carbone.
Pour une araignée, qui perçoit le monde principalement à travers les vibrations et les courants d’air, s’approcher d’une bouche humaine serait l’équivalent pour nous de nous diriger vers l’antre d’un dragon. Elle n’a absolument aucune raison de s’y aventurer volontairement. Son instinct de survie la pousse à fuir ce genre de situation, pas à l’explorer.
2. Le point de vue du dormeur : vos réflexes veillent
Même si, par un hasard incroyable, une araignée se retrouvait sur votre visage, votre corps n’est pas inerte pendant le sommeil. La peau du visage est l’une des zones les plus sensibles de notre corps, truffée de terminaisons nerveuses. Le simple contact des pattes d’une araignée, aussi légères soient-elles, suffirait très probablement à vous tirer de votre sommeil, ou au moins à provoquer un mouvement de recul instinctif.
De plus, si cette araignée téméraire parvenait jusqu’à votre bouche, le réflexe de déglutition n’est pas constamment actif la nuit. La présence d’un corps étranger et solide sur votre langue ou dans votre gorge déclencherait immédiatement un réflexe de toux ou de rejet. Votre corps est programmé pour se protéger, même lorsque vous dormez.
L’origine de l’intox : une expérience sur les « fake news »
Alors, si cette histoire est si fausse, d’où vient-elle ? La source est aussi surprenante que révélatrice. Loin d’être une vieille croyance ancestrale, ce mythe a été inventé de toutes pièces en 1993 par une journaliste nommée Lisa Holst.
Dans une chronique pour le magazine PC Professional, elle a délibérément rédigé une liste de « faits » absurdes pour illustrer la facilité avec laquelle les fausses informations pouvaient se propager via les chaînes d’e-mails, l’ancêtre de nos partages viraux sur les réseaux sociaux. Parmi ces inventions se trouvait notre fameuse affirmation sur les huit araignées.
L’ironie est mordante : une information créée pour dénoncer la crédulité est devenue l’une des légendes urbaines les plus tenaces d’Internet. Le but de Lisa Holst a été atteint au-delà de ses espérances, prouvant que plus une histoire est marquante, plus elle a de chances d’être crue et partagée, indépendamment de sa véracité.
Pourquoi cette légende urbaine a la vie si dure ?
Si l’explication est si simple, pourquoi continuons-nous à y croire ? La réponse se trouve dans notre psychologie.
L’arachnophobie, un terreau fertile
La peur des araignées, ou arachnophobie, est l’une des phobies les plus répandues. Ce mythe vient toucher directement cette peur primaire et irrationnelle.
Il combine l’image d’une créature que beaucoup trouvent repoussante avec l’un de nos états les plus vulnérables : le sommeil. Cette combinaison explosive crée une image mentale si forte qu’elle court-circuite notre esprit critique.
Revoir notre relation avec les araignées
Plutôt que de les voir comme des intruses menaçantes, nous pourrions commencer à considérer les araignées comme des colocataires discrètes et très utiles. La plupart des espèces que l’on trouve dans nos maisons sont totalement inoffensives pour l’être humain. Mieux encore, elles jouent un rôle écologique essentiel en se nourrissant de :
- moustiques
- mouches
- d’autres insectes bien plus gênants.
En un sens, elles sont un insecticide naturel et gratuit.
Vous pouvez dormir tranquille. L’histoire des araignées avalées la nuit n’est rien de plus qu’une intox tenace, née d’une expérience journalistique et nourrie par nos peurs.
La biologie, la logique et l’histoire de sa création prouvent de manière irréfutable qu’il s’agit d’une fiction. Votre bouche n’a jamais été et ne sera jamais un restaurant pour araignées.
Et vous, avez-vous déjà cru à ce mythe ? Partagez votre expérience en commentaires !